“Touche ma bosse” : quand le harcèlement sexuel est filmé et revendiqué comme divertissement
Certaines scènes, autrefois inimaginables, deviennent aujourd’hui des contenus viraux. Non pas parce qu’elles apportent quelque chose à la société, mais parce qu’elles exploitent le malaise, la transgression, le choc immédiat.
Dernier exemple en date : un homme, Mickael Ménard, de Studio Bubble Tea, le père de Kalys et Athéna, se filme en pleine rue, face caméra, en train de dire à une inconnue : “Touche ma bosse.” Il insiste, mime le geste, et laisse clairement entendre que sa “bosse” est une référence sexuelle.
Ce type de séquence pourrait passer, aux yeux des plus cyniques, pour une provocation “potache”. Mais elle n’a rien de drôle. Elle ne relève ni de l’humour, ni de l’audace, ni de la critique sociale.
C’est un acte de harcèlement sexuel, capté, assumé, monté et diffusé sur Internet par celui qui en est l’auteur.
Une scène d’humiliation, pas une blague
Dans cette vidéo, ce n’est pas l’homme qui est tourné en ridicule. C’est la femme, placée en position d’inconfort, forcée de réagir à une sollicitation sexuelle publique et non consentie.
Le but de cette scène ? Obtenir une réaction. Créer un malaise. Faire rire — mais au dépens de l’autre.
Cela porte un nom : la prédation filmée.
Et ce comportement n’est pas anodin. Il ne s’agit pas d’un sketch fictif, joué par des acteurs. Il s’agit d’un individu s’adressant à une personne réelle, dans un contexte réel, en détournant la rue, un lieu commun, en terrain de chasse sexuelle.
Un homme connu des enfants : l’inacceptable contradiction
Ce qui rend l’affaire encore plus grave, c’est que l’homme en question est également le créateur d’une chaîne YouTube présentée comme “familiale”, voire destinée aux enfants. Il est suivi, regardé, parfois admiré par un jeune public qui le connaît sous des traits plus “légers”, plus “bon enfant”.
Mais comment peut-on, d’un côté, divertir des enfants, et de l’autre, provoquer des femmes dans la rue en parlant de ses organes génitaux ?
Comment peut-on assumer un double discours aussi toxique sans que cela ne soulève de réactions ?
La réponse est simple : cela ne devrait pas être toléré. Et pourtant, cela existe encore, visible, partagé, liké, monétisé.
La violence verbale comme stratégie d’image
Ce type de contenu n’est pas une erreur de parcours. C’est une construction volontaire, pensée pour provoquer. Dire “touche ma bosse” à une inconnue en la filmant, c’est bien plus qu’une indécence.
C’est l’affirmation d’un pouvoir. Celui d’un homme qui pense que son contenu est au-dessus des lois, au-dessus du respect, au-dessus des autres.
Ce comportement participe à un imaginaire dégradant dans lequel les femmes ne sont que des objets de réaction, des corps sur lesquels on peut projeter ses pulsions, ses blagues, ses défis.
Et cela, mis en scène et diffusé par un adulte influent, donne l’exemple le plus toxique qu’on puisse transmettre à des jeunes.
Des plateformes passives, des spectateurs désensibilisés ?
Il est temps d’ouvrir les yeux sur la responsabilité des plateformes. YouTube, TikTok, Instagram… Ces entreprises ont les moyens techniques d’identifier ces contenus. Elles ont des chartes. Elles ont des règles.
Mais la vérité, c’est que trop souvent, rien n’est fait tant que l’indignation publique ne monte pas.
Quant aux spectateurs, nombreux sont ceux qui likent, commentent, relaient — parfois sans réaliser qu’ils valident ainsi un geste inacceptable. Ou, pire, en le sachant, mais en s’en moquant.
Conclusion : la rue n’est pas une scène pour les agressions filmées
Demander à une femme de “toucher sa bosse” dans la rue n’a rien d’une blague.
C’est une agression verbale à connotation sexuelle.
C’est une tentative de rabaisser, de troubler, de dominer.
Et lorsqu’un homme qui tient ce discours se présente en parallèle comme un animateur “sympa”, suivi par des enfants, il y a un danger.
Un danger d’influence.
Un danger de banalisation.
Un danger de confusion des repères.
Il est temps de dire clairement : ce n’est pas drôle, ce n’est pas osé, ce n’est pas provocateur. C’est condamnable.